
Soutenance de thèse de Maria BESSELIÈVRE
Maria BESSELIÈVRE soutiendra sa thèse intitulée "Coût résidentiel et enquêtes mobilité, mariage d’amour ou mariage forcé ? Un système technique et politique territorial à l’épreuve de l’appropriation d’une notion transversale", préparée au LAET et dirigée par Jean-Pierre NICOLAS et Stéphanie VINCENT.
/// Résumé de la thèse
Comment étudier de manière articulée les phénomènes de précarité énergétique, de dépendance automobile, ou de périurbanisation, qui apparaissent comme différents symptômes de mêmes inégalités sociales et territoriales ? Certains auteurs proposent, de manière renforcée depuis le début du XXIe siècle, de renouveler les réflexions transversales urbanisme-déplacement des années 1980 en se recentrant sur le vécu des situations résidentielles des habitants d’un territoire. Une notion apparaît alors intéressante pour outiller les collectivités dans leur déploiement territorial et les ménages dans leur choix résidentiel : le coût résidentiel. Elle consiste à considérer ensemble les dépenses de logement et de mobilité quotidienne des ménages en fonction de leur localisation résidentielle. Néanmoins, cette notion transversale peine à devenir un concept opératoire par manque de support statistique standardisé à l’échelle territoriale qui appréhende à la fois le logement, la mobilité quotidienne et le revenu des ménages. Face à ce constat, ce travail de recherche déplace les réflexions sur la notion de coût résidentiel de sa définition à notre capacité collective à l’outiller. Plus fondamentalement, cette thèse alimente les réflexions sur les espaces de conceptualisation de notions dont le caractère transversal se heurte à l’organisation sectorielle et multiniveaux de l’action publique, prégnante jusque dans les processus de prise de décision de l’appareillage statistique des territoires. Un point d’articulation dans la quantification du coût résidentiel est apparu avec la restructuration des Enquêtes Ménages Déplacements (EMD) en Enquêtes Mobilité Certifiées Cerema (EMC²). Dans leur nouveau format, les EMC² peuvent adjoindre un module spécifique à l’exploration du coût résidentiel. Par l’étude de la mise en œuvre successive de deux modules « coût résidentiel » testés au sein de l’EMC² 2019-2020 de Grenoble et de l’EMC² 2022-2023 de Clermont-Ferrand, nous questionnons la capacité du système technique et politique territorial à s’approprier la notion de coût résidentiel. À partir d’un corpus d’entretiens et d’observations, nous analysons ces deux expérimentations avec une approche socio-historique et une Advocacy Coalition Framework. Cette double lecture permet l’étude de la solidité à la fois technique et politique du module coût résidentiel, et concilie la prise en compte des résistances et des leviers d’évolutions des EMC². Cette thèse propose par ailleurs une démarche méthodologique particulière du fait de l’imbrication de différentes approches pour étudier dans un contexte de distanciation sociale imposée (période de pandémie à la Covid-19) un objet en construction où se mêlent acteurs académiques et praticiens, ainsi que des logiques locales et nationales. La proximité fonctionnelle avec certaines parties prenantes nous a amenée à accorder une attention particulière au positionnement tenu en tant que chercheuse. Au-delà d’apporter des éclaircissements sur la définition et l’usage de la notion de coût résidentiel et d’affiner la compréhension de ce que sous-tendent les transformations des EMD en EMC², ce travail permet de penser la quantification de notions transversales comme une manière de renforcer notre système statistique sectorisé. De plus, cette thèse présente des pistes pour une meilleure conceptualisation du coût résidentiel comme enjeu public, voire politique, alors que cette notion apparaît comme une manière de penser la soutenabilité de modes de vie résidentiels tant à l’échelle individuelle que collective.
/// Composition du jury
M. Jean-Pierre NICOLAS CNRS, UMR 5593 Laboratoire Aménagement Economie Transport : Directeur de thèse
Mme Cécile LEFEVRE, UMR 8070 Centre de Recherche sur les Liens Sociaux, Université Paris Cité : Rapporteure
M. Hadrien COMMENGES, UMR 8504 Géographie-cités, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne : Examinateur
M. Vincent KAUFMANN, Laboratoire de Sociologie Urbaine, École Polytechnique Fédérale de Lausanne : Rapporteur
Mme Hélène MAINET, UMR 1273 Territoires, AgroParisTech, INRAE, Université Clermont Auvergne, VetAgro Sup : Examinatrice
Mme Stéphanie VINCENT, UMR 5593 Laboratoire Aménagement Economie Transport, Université Lumière Lyon 2, Institut universitaire de France : Co-directrice de thèse
M. Bruno MARESCA, Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie : Invité